De nombreuses solutions digitales, et maintenant l’intelligence artificielle, permettent de fluidifier les échanges entre les cabinets d’administration de biens et leurs clients. Pour en tirer les meilleurs bénéfices, les organisations doivent s’adapter, et ce n’est pas toujours simple. Mais une bonne relation client fait la différence au moment d’une cession.
La relation clients des administrateurs de biens, un modèle à approfondir
Comme bien d’autres domaines, le métier de l’administration de biens a connu une profonde transformation numérique cette dernière décennie. Spécialiste de la transmission des portefeuilles de gestion immobilière et de syndic de copropriétés, Laurent Charrier de Viou & Gouron le constate à chaque mise en relation de professionnels : « C’est un des premiers sujets qui vient dans la discussion. Pas tellement pour vérifier que le cabinet à vendre est informatisé, mais plutôt pour savoir quel logiciel métier a été choisi pour sa gestion quotidienne. Derrière cette question, c’est celle de l’acculturation de l’équipe en place à une nouvelle solution qui se pose éventuellement à l’acheteur, s’il en a lui-même préféré une autre ». Car l’acquéreur espère naturellement réaliser des économies d’échelle de ce côté-là…
Si la gestion des cabinets a donc depuis longtemps franchi la première étape de la digitalisation, il reste en revanche beaucoup à faire du côté de la relation avec les clients, qu’ils soient copropriétaires dans le cas d’une activité de syndic, ou locataire et propriétaire dans celui de la gestion des biens. Force est de constater que de nombreux professionnels ont encore du retard dans cette partie de leur digitalisation. A contrario de ceux qui se sont autoproclamés « néo-syndics » et qui ont misé une bonne partie de leur attractivité – et leurs coûts agressifs – sur une fluidification et une dématérialisation très poussée de cette relation client, notamment grâce à de puissants outils de CRM (Customer Relationship Management ou Gestion de la Relation Clients).
La cerise sur le gâteau d’un professionnalisme sans défaut
Le marketing agressif de ces nouveaux venus a fait long feu, essentiellement parce qu’une bonne gestion de la relation clients ne suffit pas, et que les faits sont têtus ! La relation clients doit être la cerise sur le gâteau d’un professionnalisme par ailleurs irréprochable, sur le plan de la gestion justement, de la maîtrise du droit et des réglementations, ou encore de la qualité des prestations ».
Partout cependant, de nouveaux standards s’imposent dans la relation entre le client et son cabinet. Il devient par exemple tout simplement insupportable à un particulier :
- de devoir attendre de longues minutes au téléphone (surtout si c’est pour obtenir une promesse de rappel qui ne suivra pas) ;
- de se rendre à la Poste pour récupérer des recommandés de convocation aux AG de copropriété ;
- de ne pas savoir si l’incident qu’ils ont signalé sur (liste non limitative !) l’ascenseur, le chauffage, l’éclairage du parking, le digicode, etc., a bien été pris en compte ;
- ni sous quel délai il sera traité.
La technologie pour anticiper sur les irritants
La liste de ces situations qui créent de l’irritation est longue, et elles engendrent vite propos acerbes et courriers furieux. Jusqu’à peser parfois sur le moral des collaborateurs du cabinet, en première ligne face aux mécontents. Bonne nouvelle, les solutions pour y remédier ne manquent pas du côté des éditeurs. Elles peuvent faire partie des fonctionnalités de base, ou optionnelles, du logiciel-métier qui porte la gestion du cabinet. Parmi elles :
- La création d’extranets, pour les copropriétaires, les locataires ou encore les bailleurs ;
Des fonctionnalités autour de l’organisation d’assemblées générales autorisant, par exemple, le vote en ligne, à partir d’un ordinateur ou même d’un smartphone ; - Les carnets d’entretien des immeubles ou des lots gérés, consultables en ligne par les clients. Ils sont synchronisables avec des tableaux de gestion des évènements, des ordres de services, des sinistres et la to-do list du cabinet ;
- Les modules qui permettent de proposer aux copropriétaires ou aux locataires d’effectuer des règlements à distance, par exemple par carte bancaire, en toute sécurité ;
- La possibilité d’exporter l’ensemble des documents de gestion sous forme dématérialisée vers les interlocuteurs qui préfèrent ce moyen plutôt que de les recevoir au courrier postal ;
- La gestion centralisée de la communication avec les propriétaires, afin de faciliter les envois groupés, y compris de notifications par SMS ; ou au contraire, qui aide à gérer des échanges plus personnalisés, pour assurer le suivi d’une demande :
- Des Chats, avec des zones de FAQ pour les réponses notamment d’ordre juridique qui se posent le plus souvent, par exemple autour de la répartition des responsabilités entre un locataire et un propriétaire ;
- La gestion complète des envois de e-recommandés en nombre, par exemple pour les convocations aux AG ou la diffusion de leurs comptes-rendus
Le double flux – papier et dématérialisé – difficile à gérer
Les possibilités de fluidification de la communication ne manquent donc pas et on peut s’étonner qu’elles ne soient pas si répandues. A propos de la dématérialisation des recommandés par exemple, Laurent Charrier explique : « Les administrateurs de biens ont aussi des clients qui restent plus à l’aise avec le support papier, en particulier parmi les propriétaires bailleurs. » Et comme bien des cabinets n’ont pas la taille suffisante pour gérer deux flux de natures différentes (dématérialisé et papier), ils conservent leur ancien fonctionnement, quitte à désespérer les plus jeunes parmi leurs clients.
Quitte aussi à prendre le risque de les voir quitter le cabinet pour un confrère plus moderne ? Pendant longtemps, cette hypothèse a été battue en brèche, car tous les bons professionnels présentaient à peu près les mêmes points forts en termes de gestion et le même point faible en termes de relation client. Mais le renouvellement générationnel dans les équipes des cabinets, avec de plus jeunes collaborateurs qui démontrent une vraie appétence et un savoir-faire avec ces outils, va désormais permettre à certains de se démarquer.
L’IA pour gagner en pérennité
L’irruption de l’intelligence artificielle pourrait précipiter le mouvement. Parmi ses promesses, des analyses rapides et avec peu d’erreurs des messages reçus, vocaux ou par mail, des interactions assez abouties lors d’un appel entrant pour en comprendre la raison, répondre si c’est possible ou orienter vers le bon collaborateur dans le cabinet.
En sens inverse, l’écriture de réponses à des mails, circonstanciées et appuyées sur des bases de connaissance solides, notamment juridiques. Ces réponses peuvent – doivent – être validées par un collaborateur avant leur envoi. Elles peuvent aussi être enrichies par des données de contexte liées au client. Et tenir compte de l’humeur de ce dernier, telle qu’elle aura été détectée par l’IA à la lecture de son mail.
Cette technologie sera bientôt intégrée par les éditeurs de logiciels, n’en doutons pas. Mais il ne servira à rien d’avoir un bel outil en première ligne si, en aval, l’organisation ou les ressources en place ne tiennent pas la cadence et ne traitent pas ces messages analysés !
« La valorisation de la relation client est une bataille de long terme », rappelle Laurent Charrier. Elle se gagne aussi sur le terrain de la réputation. Mais elle doit toujours être au centre des objectifs du cabinet. Car, conclut-il, « sa conséquence directe, c’est la fidélisation, qui se mesure et se valorise au moment d’une cession, grâce à des portefeuilles de clients engagés depuis longtemps, et qui acceptent de payer un juste prix pour cette relation de qualité. »
Vous vendez votre cabinet ?