Tous les ans, nous rencontrons plus d’une centaine d’experts-comptables qui veulent céder leur cabinet ou se rapprocher d’un plus grand. Et nous voyons autant d’acheteurs potentiels. De cette position avancée sur les changements à venir, nous retirons et partageons avec vous 12 prédictions pour 2025.
1 – En 2025 il sera impératif de trouver des leviers de croissance
Au 1er janvier, la plupart des cabinets auront déjà une idée précise de leur activité à venir. A court terme, tout va presque bien. Un cabinet de 20 personnes ne périclitera pas du jour au lendemain. Mais l’inquiétude est présente, des plus petits aux plus grands. Inexorable recul des prestations réglementaires face à la facture électronique ou CA3 pré-remplies, montée en puissance des nouveaux concurrents, difficultés de recrutement… : tout converge. C’est maintenant qu’il faut se réinventer, via des spécialisations sectorielles (collectivités, CE,…), ou des savoir-faire revendiqués : tableaux de bord, DAF externalisé, RSE…
Une question de pérennité, et de valeur du cabinet quand son dirigeant décidera de le vendre ou de se rapprocher.
2 – Le conseil RSE se développera plus vite que prévu
DPEF d’abord, CSRD ensuite : du fait du ruissellement des obligations des grands donneurs d’ordre jusqu’au plus petit de leurs sous-traitants, l’élargissement et l’approfondissement des normes RSE est porteuse d’une forte demande de conseil et d’accompagnement. En 2024, de grands acheteurs ont commencé à évoquer avec nous l’importance d’un savoir-faire RSE dans le choix du cabinet qu’ils achèteront. Pour eux, il s’agit d’un vrai levier pour activer l’avenir.
Nous considérons ainsi 2025 comme l’année où les experts-comptables monteront en puissance sur les services RSE, s’ils savent se former et s’équiper en conséquence.
3 – L’IT coûtera plus cher
Les budgets informatiques des cabinets vont continuer à augmenter. Raison structurelle : l’appel croissant à des applications tierces (complémentaires à l’outil métier) pour répondre aux besoins des clients, comme les tableaux de bord automatisés, le reporting, la consolidation, la data-visualisation, etc. Raison conjoncturelle : l’explosion des tarifs de certains éditeurs en SaaS, et le coût de l’IA ajoutée à presque toutes les applications.
Le budget IT moyen des entreprises de services professionnels représente 13% de leur chiffre d’affaires. Les progrès des outils de comptabilité et de paie sont enthousiasmants, mais les gains de productivité qu’ils apportent ne sont pas immédiats. La rentabilité risque donc d’être obérée pendant la période de mise en place – souvent deux ans.
4 – La concentration du marché va continuer
Nous sommes plus sollicités que jamais pour mettre en place des rapprochements et des regroupements de cabinets. Il reste de la marge : la concentration du marché de l’Expertise comptable est encore loin de ce que connaissent d’autres secteurs, comme l’audit.
Les conditions de marché et les nécessités d’investissement technologique donnent au mouvement toutes les raisons de perdurer, voire de s’accentuer côté vendeurs. De même que côté acheteurs : les Big10 ne sont pas les seuls à avoir des stratégies de croissance externe.
5 – Le marché restera à l’avantage des vendeurs
D’une manière générale, les opérations de transmission de cabinets d’Expertise comptable resteront à l’avantage des vendeurs, avec une demande enregistrée encore largement supérieure à l’offre – même si cela est dans une moindre mesure que l’année écoulée.
6 – Les taux ne constitueront plus un frein
La hausse brutale des taux est derrière nous. Elle avait donné un coup de frein aux transactions, avant que les nécessités entrepreneuriales ne reprennent rapidement le dessus. En 2025, et même si on est encore rarement financé en-dessous de 2,7 ou 2,8% à l’heure où nous écrivons, il nous paraît que les acheteurs se sont habitués à ces niveaux, et qu’ils ont intégré cette variable dans leurs business-plans.
A noter que la hausse des taux n’avait pas fait chuter les prix.
7 – Moins de ventes sèches, davantage de rapprochements
En 2025, les experts-comptables désireux de vendre leur cabinet et de partir à la retraite se trouveront en concurrence avec ceux qui chercheront à se rapprocher avec un plus grand, que ce soit pour y rester ou pour ouvrir d’autres portes à leurs jeunes associés.
Cette tendance à l’adossement, largement partagée par les indépendants (moins de 500 K€ de chiffre d’affaires), va de plus en plus concerner des cabinets de 20 personnes et plus (CA supérieur à 2 M€). La taille critique paraît de plus en plus élevée pour assurer à la fois l’avenir du cabinet, l’épanouissement de ses collaborateurs, et la valeur des parts de ses dirigeants.
8 – Les vendeurs seront exigeants
En 2025, tout cabinet vendeur ou presque sera en capacité de choisir entre différents acquéreurs potentiels. Les experts-comptables sont des gens responsables, et tous ceux qui vendent leur cabinet prêtent attention à la personnalité du cabinet acheteur et à la manière dont il respectera ses propres engagements envers les clients et les collaborateurs.
Quand le vendeur cherchera un rapprochement, et au-delà des modalités de l’opération, il va avoir d’autres exigences. Il voudra connaître l’organisation de l’acquéreur potentiel, avoir des précisions sur la réalité des services mutualisés, et pouvoir mettre dans la balance ce qu’il y gagnera et ce qu’il laissera derrière lui.
9 – La financiarisation passera à l’action
L’arrivée des fonds dans le monde de l’Expertise comptable a d’abord été tonitruante – de très grosses opérations, avec des valorisations généreuses. Aujourd’hui, ce sont les fonds de Private Equity qui s’intéressent de près à la profession comptable, sur des échelles financières beaucoup plus raisonnables.
Très peu d’opérations de ce type ont été bouclées en 2024. Mais les levées de fonds réalisées vont se traduire dans des rachats en 2025. Nous verrons se multiplier les opérations entrepreneuriales à taille humaine, soutenues par du Private Equity, dans le but de constituer un petit groupe à partir d’un cabinet de taille moyenne (20-50 personnes).
10 – Les délais de vente pourraient s’allonger
Les vendeurs ne seront pas les seuls à avoir des exigences. Les acheteurs seront plus regardants. Dans le contexte économique et politique actuel, il ne faut pas s’attendre à de l’euphorie, mais plutôt à de la prudence. Les potentiels acquéreurs voudront connaître du mieux possible la réalité de l’exploitation et les profils personnels des vendeurs.
Le cabinet vendeur entre t-il dans la stratégie du groupe ? Peut-il évoluer ? Sera t-il bien dirigé ? Autant de questions qui s’ajoutent aux points de réflexion habituels (comme la nature du portefeuille par exemple). Connaître les profils des uns et des autres sera indispensable pour de bons « matchs », sous peine d’allonger les délais de cession.
11 – La montée de la valorisation par l’EBE
Le chiffre d’affaires contractualisé constitue la base de valorisation des cabinets, tout particulièrement pour ceux de moins d’1 M€ de chiffre d’affaires. C’est la logique du multiple sur le portefeuille récurrent – entre 0,8 et 1,1 la plupart du temps – qui prévaut depuis des lustres.
La tendance naissante à la financiarisation de la profession entraînera à terme un changement dans le mode de valorisation des cabinets, au profit d’une approche par l’EBE, avec un multiple situé à 5 et parfois au-delà. En conséquence, les gains de productivité et la multiplication des missions à plus forte valeur ajoutée vont s’avérer clés.
12 – La profession comptable n’aura pas peur du futur
Il n’y a pas de village gaulois parmi les experts-comptables. Tous ont compris qu’il leur fallait se réinventer, donner du sens à leur cabinet, rester indispensables à leurs clients. Il faut des moyens pour réussir cette transformation sans s’épuiser, pérenniser et construire. L’union est à l’ordre du jour.
De même qu’elle est passée de la comptabilité-rétroviseur à la comptabilité prédictive, nous pensons que la profession pariera de plus en plus sur le futur à construire, et plus seulement sur un passé reproductible. Une vraie logique d’entrepreneurs.
Bonne année à tous.
Vous vendez votre cabinet ?